jeudi 24 avril 2008

Pléonasme LIBÉrateur

J'ai beaucoup ri hier à ce pléonasme vu dans Libération à propos de la bourde d'Elkabbach annonçant la vraie-fausse mort de Pascal Sevran à l'antenne d'Europe 1. Le journal, qui s'appuie décidément sur une verve retrouvée après avoir inventé l'immortel "président bling bling", titrait "Elkabbach, le scoop de la mort qui tue". Voilà donc une belle figure de répétition dont le Littré donne selon moi la meilleure définition : Figure de syntaxe par laquelle on ajoute à une phrase des mots qui paraissent superflus par rapport à l'intégrité grammaticale, mais qui servent pourtant à y ajouter des idées accessoires, surabondantes, soit pour y jeter de la clarté, soit pour en augmenter l'énergie. Voila pour l'énergie. Pascal Sevran aura sûrement fait le plein de tonus en apprenant avec quelle voracité, appétit et gourmandise sa disparition pouvait être annoncée...

Notons que ces pléonasmes, voulus pour souligner le propos, n'eussent été que des négligences de style, autrement appelées tautologies, si elles n'avaient été dressées à dessein. Et le dessein manque parfois à la presse (en l'occurrence audiovisuelle) quand, pressée par la tendance délatrice et incontrôlable des blogs et autres avatars du média qu'est devenu Internet, les rédactions mettent au pinacle les valeurs de rapidité, voire d'exclusivité (bel oxymoron) des informations qu'elles diffusent. Ainsi la bourde de début de semaine de LCI, diffusant de longues minutes la nécrologie d'Yves Saint-Laurent... à la place de celle d'Aimé Césaire !

Je serais Yves Saint-Laurent, je ne regretterai pas de m'être rendu invisible ces dernières années. Les médias sont sur une pente glissante à laquelle il leur est difficile de trouver une parade. Il ne reste à Elkabbach qu'à incriminer sa rédaction, à l'exemple d'un Calife marocain dont la phrase fait désormais office de maxime : "Le Minaret est tombé, que l'on pende le barbier !"

mercredi 23 avril 2008

Antinomie Bushienne

L'antinomie est une figure d'opposition : une contradiction entre deux dispositions d'un même texte. Selon le Littré, il s'agit de la contradiction entre deux lois exprimée, donc, dans une même phrase. Dabeuliou Bush étant lui-même une forme incarnée d'antinomie au réel (et lui-même en phase de décadence vers l'opposition) il est capable, encore récemment, de dire des choses comme : "Les Etats-Unis ne renonceront pas à leurs efforts visant à aider le peuple Libanais (...) à résister aux ingérences dans leurs affaires intérieures"... Trois secondes de silence plus tard, on comprend donc bouche bée que, tellement attaché à la souveraineté du Liban, l'ectoplasmique président souhaite y contribuer en exerçant une sorte de devoir d'ingérence....

On n'est plus à une stupéfaction près de la part de cet expert du parler-faux qui eût pu utiliser aussi naturellement (et comme Mr Jourdain) toutes les formes recensées de figures rhétoriques d'opposition : les
antithèses (par exemple un vibrant "si le Liban est un petit pays, c'est une grande nation !"), les antiphrases ("Dans l'armée Syrienne, est sobre et modéré qui n'utilise que la grenade", pour paraphraser les Caractères de La Bruyère), les paradoxes ou antilogies ("combattre pour la paix, c'est vraiment être pacifique") et les oxymores (au hasard... "le rêve américain"), sans même parler des chiasmes (figures sophistiquées comprenant une double antithèse dont les termes sont inversés selon le Grand Larousse).

Tout cela est déprimant voire écoeurant, j'en conviens, mais ô combien illustratif du dépeçage que font les politiques du moindre mot. Ici la souveraineté, qu'il faut lire comme la sujétion à l'Empire du Bien. Plus c'est gros, plus ça fait mal ... et plus ça passe. Mais attention car, comme disait
Pierre Desproges, "Bien mal au cul ne profite jamais."